Prendre la décision que je ne veux pas ? Alors je risque réellement de me retrouver dans le bâtiment juste à côté ? Soit, si c’est là que je dois atterrir. Sinon, deux semaines avant que mon corps se laisse faire en quelques sortes, le temps va me paraître long. Honnêtement j’ai jamais poser la question. Je ne sais vraiment pas s’il a quelqu’un d’autre. Mais je viens de lui donner carte blanche en même temps. Je crois que je dois lui faire confiance, le seul problème c’est quand elle me parle d’aller dans la salle commune. Raven… je pourrais pas rester seul… j’ai pas envie de voir d’autre personne. Je me sens vraiment pas d'y aller. Je sais que quoi qu’il arrive elle décidera à ma place, mais j’ai vraiment envie de rester seul. Je suis pas en état de supporter de voir du monde, enfin pas de me mêler aux autres en tout cas.

Non, je ne crois pas que je sois le seul. Mais tu sais, j’ai peur aussi. Non, en fait je suis terrorisé. J’ai vraiment pas envie de savoir ce qu'il pourrait me faire subir.

Elle veut quand même que j’y aille. Mais je n’ai vraiment pas envie de bouger d’ici. Je suis même prêt à arracher la perf s’il le faut pour rester seul. Mais bien sûr je ne vais pas lui dire tel quel. S’il-te-plait… je veux vraiment voir personne. Je veux juste rester tranquille. M’oblige pas à y aller. Je préfère vraiment être seul… Je lui attrape alors la main et m'accroche à sa manche comme pour lui faire comprendre que je suis trop stressé pour y aller.

Elle abandonne son idée ? Je pousse un soupir de soulagement et me remets correctement dans le lit. Merci, Raven…merci beaucoup. J’ai bien entendu quand elle a dit que la solitude était un signe de dépression, mais je m’en fiche. Je peux aussi être juste le genre de mec qui aime être seul. Enfin bref, là n’est pas la question. Je vais pouvoir rester tranquille aujourd’hui. C’est presque parfait. Je pense que je vais me reposer, j’ai quand même pas beaucoup dormis cette nuit et puis je suis toujours épuisé, même si je vais mieux physiquement. Je suis épuisé à rien faire.

Pas de négociation ? Alors je ferais en sorte de lui forcer la main. En attendant je hoche la tête et la remercie quand elle baisse les stores. Raven a tout juste le temps de sortir de la pièce et de refermer la porte que déjà je sombre dans le sommeil. Je ne dors pourtant pas longtemps. Voilà que je fais un véritable cauchemar. Le genre à me réveiller en sueur. Heureusement je n’ai pas hurlé dans mon sommeil, sinon j’aurais déjà quelqu’un devant moi. Je parviens tout de même à me rendormir et là, bonheur, rien qui ne vient me déranger. C’est la voix de Raven qui me réveille alors deux ou trois heures après je ne sais pas trop. Enfin pour le repas qui ne devrait pas tarder selon elle. Je suis toujours fatigué, mais un peu moins stressé.

C’est avec une touche d’humour que je suis réveillé en plus. Que demander de plus ? Elle me propose même de prendre une douche. Mais je ne vois pas pourquoi l’infirmier devrait resté avec moi. Pourquoi il resterait avec moi ? Vous avez peur de quoi ? Que je sache plus comment on fait ? Ok là je me moque gentiment, mais j’aimerais vraiment comprendre. En tout cas je veux bien. Et… je sais pas si c'est trop demander, mais avoir une blouse propre c’est possible… je suis trempé de sueur là…sinon c'est pas grave.

Ok, je comprends. Comme si j’avais le choix en même temps. Mais bon, c’est vrai que je suis sous surveillance. Faut dire qu’en taule on avait tout juste plus d’intimité. Quand elle se moque de moi pour la blouse je hausse les épaules. Bah j’en sais rien moi… y a peut-être eu des coupes budgétaires… enfin bref. Je me lève pas besoin d’appeler Mister T Je me lève donc et le temps de me réveiller complètement et de me redresser le temps qu’elle aille parler avec les infirmiers.

Finalement je me retrouve quand même avec Mister T qui m’enlève la perfusion. D’après ce qu’il m’explique les résultats de ma prise de sang sont revenues et sont assez bon pour l’enlever, ce qui me soulage il faut dire. Cependant il reste quand même avec moi. Normal. Je ne perds pas trop de temps et me lave en vitesse, bien que correctement. Faut dire que je suis finalement assez pudique.

Lorsque je retourne dans le lit, après la douche, une infirmière arrive au même moment pour rapporter le repas. Une synchronisation parfaite. Et aujourd’hui, plus que le rendez-vous avec Raven et normalement je serais tranquille.

Oula trop de question en un coup, là Raven. Alors, j’ai survécu à Mister T et oui la douche, ça fait du bien. Le repas ça aller franchement. Et non je n’ai toujours pas envie d’aller dans la salle commune et demain ce sera la même réponse que tu auras. Je soupire. Elle ne me laissera pas tranquille avec cette salle. Je pense que je vais dormir ou alors juste fermer les yeux et réfléchir un peu. A ce dont je vais pouvoir te parler notamment. Ouais je vais faire ça. Chercher ce que je vais pouvoir te dire, sinon je risque d’être muet comme une tombe.

Je ne boude pas Raven, j’aime juste être seul. C’est vraiment grave ? Pourquoi vous obligez les gens à y aller ? C’est juste parce que la solitude peut être symptôme de dépression ? Enfin, laisse tomber.

Elle finit par me laisser après m’avoir répondu. Je ne tarde pas à m’endormir un peu, avant de passer une grosse partie de l’aprèm juste à réfléchir, assit dans le lit ou debout devant la fenêtre. Un peu avant 17h un infirmier vient me chercher pour me conduire dans la même salle que hier aprèm. Raven m’y attend déjà et je prends place en face d’elle. J’ai l’impression qu’arriver au parloir, là… Finalement c’est pas si différent de la taule ici.

Si ce n’est que la raison de notre venu, alors autant dire que c’est pareil. Je m’installe correctement sur le fauteuil avant de reprendre la parole. Quand vous me laisserez sortir, que ce soit d’ici ou d’à côté tient, je pense que j’irais voir mes parents à Las Vegas. Je ne sais même pas si mon père a toujours son magasin. Je ne sais même pas s’ils vivent toujours là-bas en fait. Je réfléchis un instant. En fait je ne sais pas grand-chose d’eux depuis que je suis partie y a 15 ans. Je ne leur ai pas parlé depuis. Ni à mon frère. Je sais pas s’il fait toujours le même boulot. Génial non, je ne sais même pas ce qu’ils deviennent…

Même pas. En fait ce qui m’empêche de les appeler c’est tout simplement que je n’ai pas leur numéro. Ni celui de mon frère. Ou alors je ne sais pas où je l’ai foutu. Je lui souris en retour. Si j’appréhende ? Je suis mort de peur, oui. Je sais pas comment ils pourraient réagir. Comment je pourrais leur dire ce qu’est devenu ma vie ? En fait, j’ai pas vraiment hâte. Puis comment je pourrais expliquer mon train de vie avec un salaire de videur. Je pourrais pas leur mentir. J’ai même aucune idée de pourquoi je veux les voir, j’ai appris à vivre sans eux…

J’ai jamais eu envie de les revoir. Le seul membre de ma famille à être venu à mon procès c’est mon grand-père maternel et il est italien. Il est venu de Florence pour moi. Alors que eux n’ont pas fait le trajet. C’est avec une certaine amertume que j’évoque ainsi mon passage devant la juge. Il n’y a que mon frangin qui est venu me voir en prison. Parce qu’il était de passage sur New York… tu vois un peu la famille. En parlant de lui. Alexander est plus âgé que moi. De trois ans. Il est… était le genre beau gosse intello. Aujourd'hui je sais pas. Je sais même pas si je le reconnaîtrais. La dernière fois que je l’ai vu il était sur le point de devenir adjoint du procureur à Vegas.

Malheureusement, non. Il est mort il y a cinq ans. Il m’a légué une propriété en Toscane. J’y suis même jamais allé. Je ne l’avais rencontré que le jour de mon procès. Puis il est venu deux durant les cinq ans. Je baisse la tête en parlant de lui. Je ne l’ai presque pas connu, mais il me manque. Je ne sais vraiment pas quoi penser de ma famille. Pourquoi ils ont pas essayé de m’appeler… je suis pas l’enfant prodige comme Alex, mais je suis aussi leur fils, non ? Puis tu sais. Alex… il est tellement droit qu’il en est chiant. Enfin quand on était gosse. Il me balancer direct quand je faisais une connerie.