Alors ça y est. Je suis un tueur. J’ai bien dû hésiter pendant une heure avant de finalement y aller. Je savais qu’il serait dans cette ruelle. Trois balle dans le dos. Ça devrait suffire. En tout cas je ne suis pas resté sur place. Je suis aller au boulot. Je sais que mon boss dira que je suis venu à l’heure si jamais les flics nous interroge. Il me faut juste me rendre à l’évidence je suis épuisé, je ne peux pas rester ce soir. Depuis quelques jours déjà je suis fatigué, ça plus cette putain d’infection urinaire que je me tape… Mais de là à tomber dans les vapes au milieu du bar.

Je me réveille dans une ambulance avec le bip intermittent d’un moniteur cardiaque et un putain de tube dans la gorge. Je suis toujours aussi épuisé et complètement à l’ouest, mais au moins je suis conscient comme on arrive au Mont Sinaï, sauf que si je comprends bien je suis censé être sédaté. Finalement j’aurais peut-être dû le prendre ce traitement contre ma carence…

Je fini par reperdre connaissance pour ne me réveiller que bien plus tard. Dans une chambre, de nouveau cette canule dans le nez, comme la dernière fois que je suis venu, mais en plus il y a toujours un moniteur cardiaque et je suis également sous perfusion de je ne sais pas trop quoi. Au moment où j’allais appuyer sur le bouton pour appeler les infirmières la porte s’ouvre pour laisser passer une personne que je connais bien.

Je ne réagis pas tout de suite à sa petite pique. Elle a raison, c’est ça le pire. Je regarde un peu autour de moi, me demandant comment je vais pouvoir lui répondre. « J’ai déconné cette fois on dirait. » Je ne sais pas du tout si elle est déjà au courant de ce que j’ai ou pas, je vois juste qu’elle tient un dossier dans ses mains, mais si ça se trouve ce n’est même pas le mien. Je me tourne enfin vers elle. « En tout cas, ça fait du bien de voir un visage amical ici. C’est vrai que je n’aime pas du tout cet endroit. Tu es au courant de la façon dont j’ai réagi la dernière fois ? » Je parle bien sûr que ma crise de panique, de la perf arrachée, même si cette fois je ne me risquerais pas à l’arracher, à moins que je ne refasse une crise.

Pas qu’un peu, ça y est c’est lâché. J’ai dépassé des limites que je n’aurais pas dû. J’aurais pu m’écrouler devant le type que je venais de descendre et me réveiller avec des menottes aux poignets. Mais non, j’ai finalement eu de la chance dans cette affaire, j’ai même un alibi on peut dire. Enfin là n’est pas la question. J’observe Raven s’avancer vers moi et prendre place. Un mauvais élève qu’elle dit, elle est donc parfaitement au courant. « Est-ce que tu vas me faire interner ? Par précaution ? » Je ne sais même pas vraiment pourquoi je lui pose la question comme ça. En tout cas elle me demande de lui expliquer ce que je fais là, cette fois. Je me redresse comme je peux dans le lit, j’ai presque aucune force dans les bras, je suis épuisé physiquement. « Je me souviens juste m’être écroulé au boulot en arrivant. Peut-être que ça un rapport avec mes carences en vitamine ? B6 et B12 si je me souviens bien. D’après les quelques recherches que j’ai faites, ça fragilise le système immunitaire… c’est peut-être ça qui a fait que je me tape une infection urinaire depuis plus d’une semaine et que je suis crevé ? » En tout cas, tout doit être marqué dans le dossier qu’elle a posé sur la tablette. « Enfin, je ne suis pas médecin… »

Alors comme ça c’est moi qui lui en donne l’idée. J’aurais mieux fait de me taire en fait. Enfin, maintenant elle y pense et moi ça ne m’arrange pas. Je ne fait pourtant aucun commentaire. Elle a raison. Il faudra bien que quelqu'un me surveille pour que je prenne mes médicaments.

Elle m’aide alors à me redresser et je lui lance un merci avant de lui expliquer ce que je fais là selon moi. Elle confirme ce que je pense. C'est les carences qui ont provoqué ça. Mais surtout elle me demande pourquoi je ne me suis pas fait soigner. Et surtout elle me dit que j’ai le droit de poser des questions. Je lève les yeux vers elle, sacrément honteux. « Raven… tu connais mon boulot… j’ai une réputation à tenir… j’avais… je pouvais pas me plaindre pour si peux. Ça fait mal et alors ? C’est comme ça dans mon monde… laissez-moi rentrer… » Je sens que je commence à stresser. Je suis dans la merde avec mon patron… et bien sûr mon cœur s’emballe ce qui se voit et s’entend sur le moniteur…

Elle n’approuve pas ? Je m’en doute bien. En même temps une personne normale ne peux pas approuver de vivre en hors-la-loi. Mais c'est comme ça. Je ne lui répond pas. Me contentant de respirer calmement en cherchant à ralentir mon cœur. Je ferme les yeux un instant avant de les rouvrir et de la fixer. «Tu vas me faire interner, hein ? J’aurais mieux fait de me taire… Raven… fait pas ça s’il te plait. » Je prend le gobelet d’eau qu’elle ma servit et le porte à ma bouche. Je me rend compte que je me suis vraiment affaibli comme il semble être des plus lourds. Mais je fais tout pour ne pas lui montrer que je lutte. Si seulement elle savait à quel point j’ai honte de moi. «Je suis désolé de te faire du travail en plus… »

Je n’ai pas vraiment envie de rire pour le coup. Elle me confirme que je vais me retrouver dans son service. Je la laisse continuer sur sa lancée, me dire que c’est pour mon bien. Elle me parle même de Bellevue si jamais ça se passe mal. Je sens une larme couler sur ma joue. Je vais avoir de gros problèmes avec mon boss et dans mon monde cela veut souvent dire la mort. Je la regarde comme elle pose sa main sur moi. Elle me dit alors qu’elle préfère me savoir ici que dehors a faire le con comme elle dit. « Raven, faire le con c’est tout ce que je peux faire. Avec mon casier je n’ai rien trouvé d’autre. Si je ne peux pas rentrer chez moi je suis mort.. mon boss ne plaisante pas… me fait pas ça. »

Raven essuie la larme qui coule sur ma joue. Elle me parle alors de faire effacer mon casier. Avant bien sûr de me dire que c'est pour mon bien. Mais bien sûr Raven... pour mon bien... Tu me connais... Tu crois vraiment que je vais aller me pointer dans un palais de justice pour faire effacer mon casier ? Avec tout ce qui y est noté ils vont me demander des dizaines de milliers de dollars. Je ne suis pas le genre à qui on pardonne. Et le pire c'est mon boss. Raven... il va me buter, réellement. Il ne rigole pas. Je vais le planter pour plusieurs jours... il va me faire tuer... Je suis on ne peut plus sérieux. Je me redresse un peu plus dans le lit. Alors, Dr Newman, faite moi interner si vous voulez... Seulement je commence à me sentir mal à m'être relevé trop vite, il faut dire que je n'ai pas ménagé mon corps...

J’ai l’impression qu’elle ne m’écoute pas. Mais en même temps comment lui expliquer que je suis payé pour casser des dents, mais surtout pour récupérer du fric. Je vais pour lui répondre, mais elle se lève déjà et me plante là pour sortir quelques instants de la chambre. Elle revient pour me dire que cette fois c’est trop tard, mon internement est acté. Je profite qu'elle soit debout pour lui demander. Dis, tu peux m'aider à me lever ? Je vois bien qu'elle ne me fait pas confiance et si je n'étais pas aussi mal elle aurait eu totalement raison. Ne fait pas cette tête, je veux juste aller aux toilettes. Je me lève de toute façon, il faut vraiment que j'y aille. Même si je sais bien que je vais douillé. Il vaut qu'en même mieux qu'elle me retienne sinon je risque de me retrouver par terre.

Elle s'approche de moi et vient m'aider à me relever correctement. Comme elle me le demande je prends appuie sur ses épaules, mais surtout sur le portant pour les perfusions. C'est que je n'ai pas envie de lui faire mal. Je ne sous-entends pas qu'elle est fragile, mais disons que je suis un peu plus lourd qu'elle quand même. Tu vois bien que je ne suis pas en état de me barrer. Tu me fais si peux confiance ? Bon en même temps je ne suis pas un modèle de confiance il faut dire. Mais bref, je me contente d'avancer lentement, mes jambes ayant du mal à me porter. Comme elle me l'avait annoncé un aide-soignant m'accompagne et le chanceux peut même profiter des insultes que je lance à cause de la douleur. C'est le même qui vient m'aider à me rallonger après deux ou trois minutes peut-être. Je le remercie en reprenant place dans le lit. Raven... tu trouves pas qu'il fait super chaud? Je suis en sueur, c'est horrible. Mon dieu je suis dans un état lamentable et je suis loin de faire le fier.

Elle ne trouve pas qu’il fasse particulièrement chaud sans doute que j’ai un peu de fièvre. Je tente de me détendre un maximum. Je hoche la tête quand elle me propose un verre d’eau. Raven tu sais ce qu’il m'est arrivé quand j'étais plus jeune ? Je crois que je ne te l'avais jamais dit. Je... Enfin ça t’intéresse peut-être pas. Je la regarde un instant en souriant un peu nerveusement. Je sais que je ne lui ai jamais raconter mon passé, même pas à son frère. Je n'en n'avais jamais parlé jusqu'à récemment. Je devrais peut-être garder sa pour un de tes collègues. Je pourrais aussi lui expliquer que je vais me faire descendre... mais bon en même temps un type comme moi... c'est la logique des choses non ?

C'est assez bizarre de devoir se faire aider pour pouvoir boire. Je me sens des plus faibles. Elle me dit alors que si, elle veut bien m’écouter entant que psy ou que la sœur d’un ami. Et pourquoi pas juste entant qu’amie ? Je lui souris un instant avant que ma remarque suivante ne la fasse un peu s’énerver contre moi. Tu sais que j’ai raison pourtant. Que pour la majorité des gens c’est comme ça. Mais bref. Je me cale un peu mieux pour pouvoir lui expliquer. Je suis né à Vegas dans une banlieue tranquille. Mais contrairement à mon frère aîné… Tient encore un truc qu'elle ne savait pas sur moi, j’ai un frère, mais bon 15 ans que je ne l’ai pas vu. Je n’ai jamais été un garçon vraiment sage. Et j’ai fini par me faire virer de mon école quand j’avais 14 ans. La nuit où mes parents l’on apprit j’ai fugué Je fais une pause. C'est dur de tout déballer d’une traite. A des étrangers ça va, mais je ne peux m’empêcher de croire qu’elle va me juger…

Pourquoi j’ai fugué ? Je ne m’étais jamais posé la question. Je ne sais pas. Leur réaction je l’ai eu tout de suite. Ils ont hurlé bien sûr. Peut-être que je suis partie de honte. Je ne sais vraiment pas. Je réfléchis un instant de la manière de reprendre mon histoire. Toujours est-il que je suis parti. Je suis monté en fraude dans le premier bus qui quittait la ville. Un type m’a vue et m’as payer ma place. Arrivée à San Francisco il m’a proposé de travailler pour lui… je ne savais pas dans quoi je m’engageai. Je devais livrer des paquets pour lui…. Tu vois finalement j’ai commencé tôt les conneries. Le pire c'est qu’un jour j’ai failli me faire chopper par les flics… c’est là que…il m’a tabassé, m’a tailladé le dos… les flics m’ont trouvé in extremis. À 30 min près j’étais mort…

J’en rigolerais presque si la situation n’était pas si sérieuse. Si seulement elle savait ce que je suis devenu, l’homme que je suis aujourd’hui, le tueur. La pauvre, elle ne se doute de rien. Lorsqu’elle me parle de mes cicatrices, je me tends dans l’instant. Je n’aime toujours pas en parler et me contente de hocher rapidement la tête. Elle continue sur sa lancée, tentant encore de me convaincre d’arrêter de mener la même vie qu’aujourd’hui, que cela finira par me tuer. Je ne peux pas lui donner tort, malheureusement pour moi il est trop tard. Les personnes avec qui je bosse ne me laisserons pas partir comme ça. Je ne peux pas Raven, ils ne me laisseront jamais partir comme ça. Tenter d’arrêter reviendrais à signer mon arrêt de mort. Je ne peux plus faire marche arrière… Mais dit moi, qu’est-ce qu’il y a marqué d’autre dans mon dossier ? L’arrêt cardiaque que j’ai fait à l’hôpital à San Francisco ? Celui ce connard que j’ai tabassé… c’est à cause de lui que je suis allé en taule. Il a ruiné ma vie…